Tu dis que nous contrôlons les banques… Tu dis que nous contrôlons Hollywood. Tu dis que nous contrôlons les médias. Tu dis que nous avons trop d’influence, trop de pouvoir, trop de fierté.
Mais tu ne demandes jamais pourquoi.
Alors laisse-moi te l’expliquer.
On nous a interdit de posséder des terres, alors nous avons appris à gagner notre vie avec notre esprit. Pendant que d’autres construisaient leur héritage sur le sol et le servage, nous avons bâti le nôtre sur le savoir et l’étude. Nous sommes devenus marchands, financiers, médecins et philosophes — non pas parce que nous convoitions l’or, mais parce que la terre ne nous appartenait pas.
On nous a refusé l’entrée aux universités, alors nous avons ouvert nos propres écoles et étudié deux fois plus. Notre insistance sur l’éducation ne vient pas du privilège, mais de l’exclusion.
Dans les shtetls d’Europe de l’Est et les ghettos d’Europe de l’Ouest, la Torah était notre manuel, et le raisonnement talmudique notre discipline. Quand on nous raillait parce que nous étions trop intellectuels, nous avons transformé cette insulte en armure.
On nous a confinés dans des ghettos, exclus des guildes et des métiers. Alors nous nous sommes tournés vers ce qu’il restait : le divertissement, la confection, le commerce, la narration. En Amérique, écartés de nombreux emplois « respectables », nous sommes allés vers l’Ouest et avons contribué à inventer Hollywood — non pour laver les cerveaux, mais pour rêver. Pour créer de la magie à partir de rien. Pour raconter nos histoires, puisque personne d’autre ne le ferait.
Tu dis que nous contrôlons les banques, mais nous n’avons jamais demandé ce rôle. Dans l’Europe médiévale, l’Église interdisait aux chrétiens de prêter de l’argent avec intérêt, considérant cela comme un péché — l’usure.
Mais les rois et les nobles avaient quand même besoin de prêts, et quelqu’un devait bien s’occuper des recouvrements. Alors ils se sont tournés vers les Juifs, déjà perçus comme impurs, déjà méprisés. La collecte des impôts, le prêt d’argent, la finance étaient vus comme des « travaux sales », alors qui de mieux que le « sale Juif » pour les accomplir ?
Et donc, nous sommes devenus prêteurs, non par ambition, mais par nécessité. On nous a pressés pour chaque pièce que nous pouvions récupérer ; et puis, quand les dettes devenaient trop lourdes ou que le pouvoir n’avait plus besoin de nous, on nous expulsait — ou pire.
Nos fonctions financières ont servi de justification aux persécutions, pogroms et accusations de meurtre rituel. Pourtant, nous avons survécu. Nous avons appris. Nous avons développé une compréhension de l’argent parce que nous n’avions pas le choix. Et des siècles plus tard, tu t’es retourné en disant : « Regardez comme ils sont cupides ! »
De Harold P. Drutz de Toronto