La lettre de la déraison

Ce pays mérite mieux que vos renoncements

 

Depuis des années, je me taisais.

Non par lâcheté, mais par pudeur. Parce que je croyais que d’autres allaient parler.

Mieux que moi.

Plus légitimes, plus aguerris, plus visibles.

Je pensais que, quelque part dans ce pays que j’aime plus que ma vie, quelqu’un surgirait avec assez de colonne vertébrale pour dire ce que tant pensent tout bas.

Mais les années ont passé.

Les gouvernements se sont succédé comme des équipes de théâtre de boulevard, échangeant leurs rôles, leurs cravates et leurs indignations en toc.

Et le peuple, lui, a cessé d’y croire.

Le peuple a décroché.

Il ne vote plus pour, il vote contre. Et souvent, il ne vote plus du tout.

Il faut être aveugle pour ne pas voir ce qui vient. Et il faut être lâche pour s’y résigner.

La France s’épuise. Elle s’endette pour tenir debout, elle s’excuse d’être ce qu’elle est, elle se ruine en allocations, en subventions, en éoliennes, en cabinets de conseil.

Elle s’abandonne à ceux qui crient le plus fort, elle cède aux lobbies, aux minorités, aux communautarismes, elle a peur de son ombre, de son histoire, de sa langue.

Pendant que l’on vous parle d’inclusivité, d’écologie systémique et de bienveillance managériale, la dette publique explose, les hôpitaux se vident, les écoles s’effondrent, les banlieues se militarisent, et l’État abandonne tout ce qui faisait sa force :

La clarté de ses lois, l’autorité de ses maîtres, la fermeté de ses frontières, la noblesse de son service.

Et voilà que le 10 septembre, certains appellent à bloquer le pays.

« La France à l’arrêt », prétendent-ils, comme s’ils n’étaient pas déjà les saboteurs en chef de tout ce qui marche encore.

Les mêmes qui ont érigé la grève en vertu cardinale, la manif en culture civique et l’agitation en méthode de gouvernement.

Ceux qui hurlent à la dictature quand on leur demande de travailler, et à la misère quand on ose supprimer une niche.

Ceux pour qui la réforme, c’est toujours pour les autres.

Ceux qui veulent tout, tout de suite, sans effort, sans loyauté, sans limite.

Il faudrait les remercier d’avoir, malgré eux, nommé le vrai problème :

la France est déjà à l’arrêt.

À l’arrêt parce qu’on a tout nivelé.

À l’arrêt parce qu’on a confondu la paix sociale avec l’extorsion fiscale.

À l’arrêt parce que le politique s’est couché devant la morale médiatique.

À l’arrêt parce que l’on a oublié que l’autorité, ce n’est pas la violence, mais la verticalité qui rassure et qui élève.

À l’arrêt parce que chacun ne pense plus qu’à sauver sa peau, sa place, sa rente, son petit confort.

Je n’ai pas de slogans. Je n’ai pas de costume taillé pour l’Élysée. Je ne suis ni le produit d’un appareil, ni le jouet d’un clan.

Je ne suis ni de gauche, ni de droite, ni du centre, ni d’ailleurs. Je suis de France. Entièrement.

Et j’en ai assez qu’on la traite comme une salle d’attente, comme un guichet, comme un terrain vague pour idéologies errantes.

J’écris cette lettre parce qu’il ne reste que ça, parfois, pour se faire entendre : des mots.

Mais je ne les choisis pas pour flatter. Je ne cherche pas à séduire. Je veux convaincre. Ébranler, peut-être. Déranger, sûrement.

Et réveiller, si possible.

Ce que je vous propose, ce n’est pas un programme. C’est un réveil. Un sursaut. Une reprise en main.

Pas une révolte, mais un relèvement.

Pas un renversement, mais un réenracinement.

Je ne viens pas pour vous promettre le bonheur.

Je ne crois pas à l’État-papa, à la République-maman, à la politique-biberon.

Je crois que le bonheur est une affaire personnelle, intérieure, fragile, et que le rôle de l’État n’est pas de vous combler, mais de vous permettre de vous tenir debout.

Je crois à une chose plus belle, plus dure, plus féconde que le bonheur : la dignité.

Et cette dignité, nous l’avons perdue le jour où l’on a cessé d’exiger.

Le jour où l’on a pris l’habitude de céder, de subventionner, de compenser, de redistribuer à l’aveugle.

Le jour où l’on a remplacé la justice par l’égalitarisme, la méritocratie par la discrimination inversée, le civisme par la gestion des flux.

On a voulu faire du citoyen un client.

On a cru qu’on pouvait gérer un peuple comme on gère une base de données : en ciblant, en personnalisant, en optimisant.

Mais le peuple n’est pas un marché. Ce n’est pas une foule d’usagers. Ce n’est pas une courbe. C’est une mémoire, une langue, un sol, une promesse.

Je vous parle aujourd’hui parce qu’il est encore temps.

Pas pour longtemps. Mais encore un peu.

Il est encore temps de refuser l’abandon.

De refuser d’être une province dans un empire technocratique sans visage.

De refuser de faire de la solidarité un outil d’importation de masses.

De refuser de faire de l’Europe un substitut moral à notre impuissance nationale.

De refuser de voir la France réduite à un logo, à une régie, à un service public low-cost.

Je vous parle pour que nous prenions acte de ce que nous savons déjà : Que l’État redistributeur est un colosse aux pieds de dettes.

Qu’il ne redistribue plus la richesse : il redistribue la ruine.

Qu’il ne protège plus les faibles : il assure les rentes, alimente les clientèles, engraisse les inefficacités.

Et qu’à force de promettre à tout le monde ce qu’il ne peut pas financer, il détruit la valeur même du travail.

Il faudra en sortir. Et nous en sortirons.

Il faudra oser dire ce que tout le monde sait : que la justice sociale ne passe pas par la distribution aveugle de droits, mais par la juste rétribution des efforts.

Que l’homme qui travaille doit vivre dignement. Et que celui qui refuse le travail, sans aucune cause valable, ne peut pas revendiquer les fruits de la solidarité. Que celui qui triche avec les aides triche avec la nation. Que celui qui s’enracine, qui s’assimile, qui transmet, doit être prioritaire sur celui qui rejette nos lois, nos codes, notre histoire.

Oui, je crois à la puissance.

Pas celle des tanks et des rodomontades. Mais celle d’un pays qui sait ce qu’il veut, qui défend ses intérêts, qui protège ses industries, qui rappelle à l’ordre, y compris ses partenaires.

Je ne crois pas au multilatéralisme de salon. Je crois à la parole tenue, aux frontières claires, aux alliances solides et aux ruptures nécessaires.

Et si un régime étranger nuit gravement aux intérêts français, je ne vois aucune raison de feindre la diplomatie.

Nous n’avons pas vocation à accueillir sur notre sol les ressortissants de régimes qui nous insultent, qui nous menacent, qui nous utilisent. Et si cela choque, c’est peut-être que nous avons trop longtemps confondu l’humanisme avec le renoncement.

Nous devons redevenir maîtres chez nous.

Non par orgueil. Mais par devoir.

Un État n’est pas une auberge. Une nation n’est pas un club de bien-pensance. Et la France n’est pas une province humanitaire. Elle est une histoire, un peuple, un destin.

Je ne veux plus d’un pays qui s’excuse.

Je ne veux plus d’un pays qui finance ceux qui le haïssent, instruit ceux qui le méprisent, régularise ceux qui l’insultent, s’agenouille devant ceux qui le menacent.

Je ne veux plus d’un pays qui organise sa propre disparition, au nom d’un universalisme devenu le cache-sexe de la lâcheté.

Je ne veux plus d’un peuple transformé en marché captif, en troupeau fiscal, en armée de consommateurs affranchis de toute exigence.

Nous ne sommes pas des clients de l’État.

Nous sommes des citoyens. Et à ce titre, nous avons des devoirs.

L’Histoire n’a jamais retenu les sociétés qui ne réclamaient rien de leurs membres, sinon qu’ils consomment, payent et se taisent. Elle se souvient des peuples qui savaient encore mourir pour des vivants.

Des peuples debout. Intransigeants. Loyaux.

On ne reconstruit pas une nation avec des courbes.

On la reconstruit avec des volontés. Je ne veux pas piloter une croissance. Je veux relever un peuple.

Je ne veux pas gérer la France. Je veux la faire revivre. Et cela suppose de rompre avec tout ce qui l’a mise à genoux.

Avec l’endettement comme mode de gouvernance.

Avec le cynisme des technos, le clientélisme des partis, le théâtre creux des plateaux télé.

Avec cette Europe qui, au lieu de nous protéger, nous démembre lentement, par la norme, par l’opacité, par la dissolution progressive de notre souveraineté.

Oui, je crois à une autre Europe. Mais une Europe des nations.

Une Europe des intérêts convergents, pas des dissolutions programmées.

Une Europe qui serve la France quand c’est utile. Et que la France quitte, sans hésiter, quand c’est vital.

Je ne crois pas à la neutralité. Un dirigeant qui n’assume pas de défendre son pays d’abord, n’est pas un dirigeant.

C’est un gestionnaire de ruines.

Oui, j’assume de vouloir sauver la France. Et pas l’humanité.

Je ne suis pas là pour résoudre tous les conflits du monde, pour accueillir toute la misère de la planète, pour rééduquer mes concitoyens à la bonne morale cosmopolite.

Je suis là pour redonner un avenir concret à la France.

Pas un slogan. Pas un rêve flou.

Un avenir concret.

Des comptes en équilibre. Des écoles qui transmettent. Des frontières qui protègent. Des villes qui respirent. Des familles qui élèvent. Des enfants qui parlent notre langue sans honte. Des travailleurs qui vivent de leur labeur. Des jeunes qui veulent rester au pays. Des anciens qui meurent sans être abandonnés.

La France n’est pas morte. Elle est dans un coma moral.

Mais il suffit d’un souffle.

D’un refus. D’une poignée d’hommes et de femmes décidés.

Il suffit d’un sursaut.

Un pays ne se reconstruit pas avec des slogans.

Il se reconstruit avec du courage, du temps, de l’ordre.

Il se reconstruit avec des sacrifices, assumés, partagés, encadrés.

Il se reconstruit avec une hiérarchie claire entre les droits et les devoirs.

Il se reconstruit en donnant plus à ceux qui donnent, moins à ceux qui prennent, rien à ceux qui trichent.

Je ne crois pas à la table rase.

Je crois à l’héritage.

Je crois que la France vaut d’être transmise telle qu’elle fut grande, non telle qu’elle se caricature.

Je crois que nos cathédrales valent plus que les slogans peints sur leurs marches.

Je crois que notre langue vaut plus que les anglicismes de l’entreprise ou les créolisations paresseuses.

Je crois que la France n’est pas une option culturelle parmi d’autres, mais un monde en soi, une civilisation entière.

Je crois que le rôle d’un dirigeant est de protéger avant d’expliquer. De nommer les périls sans en travestir les causes. Et de réarmer moralement une nation qui ne sait plus ce qu’elle peut espérer d’elle-même.

Oui, il faudra des lois plus dures.

Oui, il faudra du tri, des renvois, des ruptures d’accords.

Oui, il faudra remettre la nation au cœur du droit, et non l’inverse.

Oui, il faudra que le courage remplace le calcul.

Parce que tout ce qui est en train de mourir en silence, tout ce que nous croyions éternel, s’effondre dès lors qu’on recule, qu’on tergiverse, qu’on compose.

Je ne crois pas à l’idée que tout se vaut.

Je ne crois pas que le relativisme soit un progrès.

Je crois qu’il y a le bien et le mal. Le juste et l’injuste. Le vrai et le faux. Et je ne laisserai plus insulter la France sans réponse.

Ni ceux qui la servent. Ni ceux qui l’aiment. Ni ceux qui en meurent.

On ne dirige pas un pays avec des excuses.

On le dirige avec des choix. Et parfois, il faut être prêt à choquer, isoler, perdre, pour ne pas trahir.

Je ne vous dis pas que ce sera facile. Mais je vous dis que c’est possible. Et que c’est maintenant.

Car viendra un jour où il sera trop tard. Un jour où vous lèverez les yeux, et où vous ne reconnaîtrez plus rien. Pas vos rues. Pas vos enfants. Pas vos lois. Pas votre pays.

Ce jour-là, il n’y aura plus rien à défendre. Rien à transmettre. Rien à espérer.

Alors, oui, je vous le dis avec gravité, avec tendresse aussi : Il est encore temps.

Je vous écris cela, non parce que j’ai une ambition. Mais parce que je n’en ai aucune.

Je n’ai pas besoin d’un pouvoir. Je n’ai jamais rêvé de palais, de gardes républicains, de micros tendus. Je ne cherche rien pour moi. Pas un poste. Pas un fauteuil. Pas une place dans l’histoire.

J’aurais préféré et prefère encore mille fois me mettre au service de quelqu’un d’autre. De cet homme, de cette femme, qui partagerait tout ce que je viens d’écrire. Quelqu’un qui incarnerait tout cela avec humilité, avec fermeté, avec grandeur. Quelqu’un dont je pourrais être l’ombre loyale. Je l’ai cherché et le cherche encore.

Croyez-moi. J’ai tendu l’oreille. J’ai écouté. J’ai rencontré. J’ai espéré. Et, oui, j’ai été approché, sollicité, flatté, contacté par de nombreux responsables politiques.

Mais aucun, jusqu’à présent, n’a su incarner ce que je crois nécessaire.

Aucun ne m’a semblé prêt à affronter vraiment ce qui vient.

Aucun ne m’a convaincu qu’il ferait passer le devoir avant le calcul, la France avant sa carrière, le bien commun avant ses intérêts.

Alors peut-être qu’un jour, il faudra y aller.

Non pour conquérir, mais pour empêcher que tout se perde. Peut-être que si personne ne se lève, je devrai le faire. Pas parce que je le veux. Mais parce que je n’aurai plus le droit de l’éviter. Pas pour moi. Mais pour mes enfants. Pour les vôtres. Pour ceux qui n’ont pas encore de voix, pas encore de visage, mais qui hériteront de ce que nous aurons fait ou laissé faire.

Et si ce jour vient, ce ne sera pas un destin, ce sera une charge. Ce ne sera pas une marche triomphale, ce sera un sacre intérieur, austère, sans gloire, mais sans peur. Et je le porterai comme on porte une croix : debout, mais sans illusion.

Mais j’espère encore qu’un autre le fera. Qu’une femme surgira, droite et libre. Qu’un homme se lèvera, clair et fort. Et que je pourrai me ranger derrière lui, derrière elle, avec tout ce que je suis, sans bruit, sans gloire, mais avec une loyauté totale.

Alors je vous écris. À vous. Parce que je sais que certains, en lisant ces lignes, entendront l’appel. Ils ne viendront pas par intérêt. Ils viendront par fidélité. Ils ne diront pas :

« Qu’est-ce que j’y gagne ? » Ils demanderont : « Que faut-il faire ? »

À ceux-là, je tends la main. À ceux-là, je dis : rassemblez-vous. Pas autour d’un nom. Mais autour d’une idée, d’une exigence, d’un relèvement.

La France n’a pas besoin d’un chef. Elle a besoin d’un réveil.

Et le réveil, c’est maintenant. Ou jamais.

 

François VANNESSON, avocat

(Post LinkedIn du 7 septembre 2025)


Ma note personnelle : Nous sommes le lundi 8 septembre 2025. Que va-t-t-il donc bien se passer dans la France de ce jour ?